LE MYSTERE DE MUREL
 
 

En des temps lointains, comme au Moyen-âge, il était assez fréquent de rattacher certains phénomènes à Dieu ou à Satan, en fonction de leurs aspects féeriques ou diaboliques, qui n’étaient dus en réalité qu’à une vue de l’esprit ou une impression très fortement ressentie.
De nos jours, il est plus courant de trouver une explication rationnelle grâce aux moyens d’investigation et aux connaissances actuelles dans différents domaines. Or, l’énigme que je voudrais vous exposer, dépasse en réalité tout entendement humain et laisse ainsi place à toutes interprétations, y compris les plus farfelues.
Aussi, ce sera au lecteur de se forger sa propre idée sur la question et de tirer les conclusions qu’il souhaitera concernant cette mystérieuse affaire.
 
C’est durant l’été 2003 que je me suis rendu en Corrèze pour quelques jours de vacances, et plus précisément dans un charmant village entre Beynat et Argentat dont le nom évoque déjà la paix, la tranquillité et la campagne, avec un petit parfum d’ésotérisme.
Albussac, puisque tel est son nom, se trouve noyé dans la verdure et enveloppé par d’immenses forêts de feuillus, assurant ainsi le bonheur de ces habitants, puisqu’un dicton affirme que pour vivre heureux, il faut vivre caché.
En vieux baroudeur pas trop rouillé et n’ayant pas perdu ses bonnes habitudes, c’est à cheval que j’ai parcouru cette contrée idyllique avec pour tout bagage, un hamac, un sac à dos et une bâche pour m’abriter de la pluie.
Le hasard, et le goût de l’aventure, m’ont conduit sur un chemin piétonnier qui serpentait à travers bois en direction des cascades de Murel, magnifiques chutes d’eau, telles que l'on peut en voir au travers de films d'aventure, tournés dans des îles encore vierges, à la végétation équatoriale.
Ce n’est pas à la recherche d’un diamant extraordinaire, caché dans un temple Maya que j’étais parti, mais plutôt à la poursuite de mon bien-être, ce qui chez moi se traduit par des périodes de solitude nécessaire à mon confort cérébral.
 
En ces lieux magiques, j’avais trouvé l’arbre idéal pour passer la soirée et la nuit. C’était un grand peuplier blanc sans doute centenaire, d’où partaient quatre belles branches qui allaient me servir de support pour mon hamac, et au-dessus duquel j’allais pouvoir étendre ma bâche protectrice, m’épargnant ainsi l’humidité de la nuit.
Puis, après m’être mis à la recherche de quelques morceaux de bois pas trop humides, j'allumais un feu pour faire cuire ce qui allait me servir de repas. Et c’est en rêvassant assis au pied de l’arbre que le temps s'écoula paisiblement jusqu’à la tombée de la nuit.
Je me trouvais à l'orée d’une petite clairière où les rayons de la lune éclairaient des lapins qui venaient se promener par là malgrè le hululement de la chouette qui surveillait la scène du haut de son grand chêne.
Au loin, on entendait le bruissement de la cascade alors que tout autour de moi, des craquements de branches, de feuilles et autres bruits divers, prouvaient bien l’abondance d’espèces animales dans cette zone inhabitée.
 
Je méditais en regardant les braises rouges baisser d’intensité, lorsque je pris conscience qu’un silence inquiétant régnait maintenant sur ce paradis vert. Il n’y avait strictement plus un seul bruit, hormis la chute d’eau que l’on entendait toujours mais qui paraissait plus proche.
Curieusement, l’ombre de mon arbre éclairé par la lune, semblait se déplacer. Un rapide coup d’oeil me permit de constater qu’il en était de même pour les autres ombres de ce lieu magique, qui devenait étrange.
Ramsès que j’avais attaché à quelques pas de là avec une longue corde, était en train de souffler dans ses babines pour manifester une certaine inquiétude chevaline. C’est en levant les yeux machinalement que je pu entrevoir à travers les branches, l’objet de mes interrogations qui déclencha en moi une soudaine tachycardie.
Un grand triangle lumineux planait au dessus de moi, dans un silence angoissant, cherchant visiblement à se poser dans le champ voisin.
 
Cette forme étrange de 15 mètres de long et de 6 mètres dans sa partie la plus large, descendait progressivement en oscillant comme le ferait une feuille de papier et ce n’est que posé à terre, que la luminosité s'estompa doucement pour ne laisser deviner qu’un objet sombre mais bien réel.
Posé sur trois gros pieds visiblement télescopiques, l’appareil digne d’un film de science fiction n'émettait aucun bruit, aucune odeur, mais seulement une sensation inquiétante et troublante, qui donnait un peu la chair de poule.
Quelques secondes plus tard apparu sous l’engin, une sorte de trappe d’où sortait une légère lumière tamisée qui permettait de deviner depuis mon poste d’observation, un plan incliné entièrement lisse, sans marches ni rambarde.
Soudain, par cette ouverture pour le moins curieuse, apparurent cinq silhouettes de forme humaine, mais légèrement plus petites et minces par rapport au gabarit d’un terrien classique.
Elles se déplaçaient aisément dans la clairière, mais étaient visiblement à la recherche de quelque chose de précis, car elles montraient quand même quelques hésitations concernant le choix des prélèvements qu’elle faisaient ça et là.
 
Puis deux de ces personnages, tout de blanc vêtus, se dirigèrent dans ma direction mais ce n’est qu’arrivés à deux ou trois mètres de moi, qu’ils s'aperçurent qu’ils étaient observés.
Sans faire de geste brusque, je me contentais de leur adresser un «bonsoir» chaleureux en levant doucement ma main droite, la paume tournée vers eux, ce qui habituellement dans toutes les langues est compris comme étant un geste de bienvenue.
Par mimétisme sans doute, ils s'adressèrent à moi de la même manière, mais curieusement c’est en français qu’ils me manifestèrent leur gentillesse.
Leur voix était légèrement roque et métallique, mais tout en s’exprimant clairement ils m'envoyèrent  un léger plissement des yeux que j’ai considéré immédiatement comme étant un sourire.
Sans pour autant changer de position, j’essayais d’entamer une discussion pour leur demander d’où ils venaient, et de fil en aiguille nous avons fait «causette» quelques minutes.
Leur visage était curieux car plus large dans la partie supérieure et muni de deux grand yeux ovales de couleur sombre, d’un minuscule nez et d’une bouche aux lèvres quasiment inexistantes, tout comme le pavillon de leurs oreilles.
 
Cependant, quelque chose d’indéfinissable me permettait de constater que l’un des deux êtres qui se trouvaient en face de moi était sans doute une femme. Il émanait de cet individu une impression de gentillesse, de bonté et peut-être même d’amour que je percevais très nettement mais de manière extrasensorielle.
Je constatais aussi, de façon semblable, que ses yeux démunis de pupilles me fixaient avec une douceur profonde et bienveillante qui, malgré cette apparence surprenante, avaient tendance à m’attirer irrémédiablement.
Mais un léger cri, émis par l’un des personnages qui étaient restés aux abords de l’engin, fit réagir mes deux amis qui prirent aussitôt congés de moi.
Celui que je supposais être un homme, me toucha délicatement la main avec un nouveau plissement des yeux auquel j’ai répondu de la même manière, mais c’est l’adieu de l’être supposé femme qui m’a le plus troublé.
Après avoir posé la paume de sa main sur la mienne, elle s’approcha de mon visage jusqu’à effleurer mes lèvres avec les siennes, tout en pénétrant mon regard avec ces yeux bizarres qui déclenchèrent à cet instant précis, une puissante décharge électrique qui pénétra mon corps.
En ma qualité d'écrivain, il m’arrive parfois de mélanger fiction et réalité, et, par moment il m'est difficile de faire la part des choses entre ce que j’invente et ce que je vis réellement.
Allez donc savoir si cette histoire est vraie !